mercredi, décembre 13, 2006

Julien Green

Julien Green (1900-1998) est l'écrivain que j'aime le plus! Quand je le lis, j'ai l'impression d'être son confident privilégié! Ses propos et sa prose m'enchantent! Je le classe comme l'un des écrivains majeurs du 20e siècle! Sa lecture m'inspire un sentiment d'identification comme j'en ai rarement éprouvé!
Il a connu une large reconnaissance de son vivant. En 1972, il succède à Mauriac à l'Académie française. La même année, on a commencé la publication de ses «Oeuvres complètes» dans la «Bibliothèque de la Pléiade», dont l'album annuel sur lui-même a paru de son vivant (une première!). Qui dit mieux?
Son «Journal» est célèbre, mais, à mon avis, c'est dans ses romans qu'il se révèle le plus, consciemment ou non. On y rencontre des êtres tourmentés comme il l'était lui-même. Pourtant, malgré tout, il adorait la vie! Son questionnement spirituel est fort intéressant, même si l'on ne partage pas sa foi catholique.
Je considère son «Autobiographie» (Partir avant le jour, Mille Chemins ouverts, Terre lointaine, Jeunesse) comme un des plus beaux pans de son Oeuvre. C'est un bonheur de lecture d'une rare intensité! On croit l'entendre lorsqu'il nous fait des confidences. En plus des circonstances factuelles, Julien Green nous y entretient franchement des sinuosités de sa vie intérieure. C'est passionnant! Quant à son écriture, elle réunit la beauté à la clarté! Un écrivain complet, quoi!
Julien Green est né avec le 20e siècle et est décédé presqu'à sa fin! Il a donc traversé tout ce siècle riche en bouleversements de toutes sortes. Catholique fervent, sa condition d'homosexuel a provoqué chez lui de profonds déchirements intérieurs. Son oeuvre en témoigne. On pense surtout à son «Autobiographie» et à son «Journal», documents de premier ordre!
C'est à Paris que Julien Green est né le 6 septembre 1900. Ses parents étaient des Américains du Sud: Edward Green et Mary Hartridge (qui était une très belle femme!). Son père travaillait pour le bureau d'importation d'une firme cotonnière américaine. Julien était le benjamin de la famille. Dans «Partir avant le jour», il raconte que sa mère et ses soeurs aînées décelaient régulièrement la présence de «fantômes» dans la maison. Le «surnaturel» occupera d'ailleurs une place non négligeable dans son oeuvre.
Le jeune Julien a la faculté de tomber en rêverie lors des occasions les plus diverses: une goutte d'eau suintant d'un fil de fer, la résonance d'un nom asiatique, des arbres dans la brume ou la beauté des rires d'enfants. Ces éléments pouvant être chacun les points de départ d'un livre «pur», sans intrigue.
Voici ce qu'il écrit dans «Terre lointaine» (relation de son séjour comme étudiant à l'Université de Virginie) sur l'écriture et lui-même: "Je goûtais un étrange plaisir à écrire de longues pages sur l'éloignement que j'avais pour le monde et sur l'horreur que je finissais par m'inspirer à moi-même. De tout cela rien ne se trahissait au-dehors." Comme je le comprends! Voilà des propos très révélateurs sur l'homme et sa vision des choses.
En 1983, à un âge plus que respectable, il publie aux éditions du Seuil «Frère François», une remarquable vie de saint François d'Assise, l'homme qu'il a le plus admiré! Cet ouvrage est d'une grande beauté formelle et d'une profonde spiritualité! Quant au style, il est d'une pureté et d'une limpidité exceptionnelles! Du Green à son meilleur! D'ailleurs, une magnifique réédition illustrée paraît en 1991.
La passion de l'écriture l'animant toujours à un âge avancé, il publira coup sur coup une «trilogie» du Sud américain qui le hantait depuis longtemps: «Les Pays lointains», «Les Étoiles du Sud» et «Dixie». La maîtrise de l'écriture est toujous parfaite et le propos historique toujours pertinent. Quant à la psychologie des personnages, elle est toujours instructive sur la nature humaine.

En conclusion, je citerai un passage de l'étude de Robert de Saint-Jean sur Julien Green: "Écrire sur le bonheur n'est permis qu'à celui qui a longtemps souffert, parler sereinement de la mort à celui qui en a d'abord ressenti et décrit l'épouvante..." Julien Green reste un mystique cherchant la Réalité ultime (Dieu), regardant plus loin que l'apparent, scrutant l'Invisible... Sa lecture, en ce sens, est lumineuse pour qui a soif d'Absolu!

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